Bénin : Tout comprendre sur l'organisation des tours de garde des pharmacies en quelques points

Depuis quelques jours, la polémique est née suite à l’organisation des tours de garde au niveau des officines pharmaceutiques sur toute l’étendue du territoire béninois. Dès lors, des voix se sont élevées, qui, pour dénoncer l’intrusion du gouvernement dans la gestion des structures privées, ou qui encore, pour mettre l’accent sur la violation des droits des populations à se procurer librement des médicaments afin de se soigner. À ces différentes récriminations légitimes des consommateurs, et dans le souci de comprendre au mieux le mécanisme ainsi que le processus qui ont conduit à ce résultat, notre rédaction vous propose une série d’interrogations à qui des voix autorisées ont bien voulu apporter de réponses. Lisez plutôt ce qui motive la démarche du gouvernement et les mobiles qui justifient ces tours de gardes observés aux niveaux des pharmacies.
Par : Popeline HOUNKANNOU
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Question : Pourquoi le Gouvernement a décidé d’organiser les tours de garde ?
Réponse : La décision d’instaurer les tours de garde a été prise par le l’Ordre national des pharmaciens du Bénin en vertu du décret n° 2019 _ 500 du 13 novembre 2019 portant organisation et fonctionnement de l’Ordre national des pharmaciens du Bénin qui mentionne au titre des prérogatives de l’Ordre celui “d’assurer le respect et l’encadrement des horaires d’ouverture et l’organisation des gardes et astreintes des officines de pharmacies (confère article 15 du décret).
Pourquoi l’ordre a pris délibérément cette décision sans l’encadrement du Ministère ?
– Les dispositions du décret susmentionnés permettaient à l’Ordre de prendre cette décision. Toutefois, l’organisation des tours de garde étaient déjà contenus dans le projet de Loi portant organisation des activités pharmaceutiques qui précisaient qu’un arrêté du ministère de la Santé viendrait les encadrer. C’est ce qui sera fait très rapidement maintenant que la Loi est votée. Cependant le Gouvernement n’a pas attendu le vote de la loi avant de commencer par travailler avec les acteurs pour corriger les difficultés notées dans l’application de la décision.
Pourquoi faut-il coûte que coûte instaurer les tours de garde ? Autant laisser les choses évoluer telle qu’elles étaient.
– L’organisation des tours de garde est “obligatoire” pour les pharmaciens d’officines. C’est une contrepartie au monopole pharmaceutique qui leur est concédée pour la cession des médicaments.
Cette mission de service public vise à répondre aux besoins de la population en matière de produit de santé, en dehors des horaires et jours d’ouverture ordinairement pratiqués par les officines d’une zone déterminée.
Laisser les choses en l’état, à savoir laisser les pharmaciens choisir les jours et horaires d’ouverture comme bon leur semble, est de nature à désorganiser la disponibilité en médicaments. Par exemple : certains pharmaciens pourraient choisir d’ouvrir uniquement aux heures rentables de la journée, ou seulement dans la semaine et jamais le week end et les jours fériés. D’autres pharmacies en position de monopole dans une zone reculée, pourraient décider de fermer pour des vacances, pénalisant toute une localité. Toutes ces choses qui désorganisent l’accès au médicament, montrent la nécessité d’une organisation rationnelle des horaires aussi bien les jours ouvrables, que durant la nuit et les week end.
Maintenant tout est bloqué ! C’est difficile actuellement de trouver des médicaments sans parcourir des kilomètres.
– Ce n’est pas vrai.
Toutes les pharmacies demeurent ouvertes en journée de 8 heures à 22 heures et les jours fériés. Que l’on soit dans l’Atlantique, le littoral, où n’importe quelle autre villes disposant d’une pharmacie, on peut s’y rendre de 8 heures à 22 heures du Lundi au Samedi pour se procurer des médicaments.
Les pharmacies de garde assurant la continuité du service de 22 heures à 8 heures du matin du Lundi au Lundi et toute la journée du dimanche. Cette précision est importante au regard de la confusion que certains sèment dans l’opinion.
Bien qu’il soit évident qu’il y a moins de pharmacies ouvertes durant la garde que dans la journée, l’organisation du tour de garde doit cependant veiller à une répartition harmonieuse de ces pharmacies sur le territoire délimité. Le planning des tours de garde dans le Littoral semble mieux prendre en compte ce souci de répartition harmonieuse, à travers le mixage entre les petites, moyennes et grandes pharmacies effectuées par période de garde. Ce point fait partie des éléments d’amélioration que le Ministère de la Santé a demandé à l’Ordre de revoir.
Il y a certaines pharmacies dont l’importance n’est pas à rappeler. Il faut absolument que l’Etat laisse ces grosses pharmacies faire 24 h sur 24.
– L’expérience et la pratique montrent que laisser des pharmacies ouvertes 24h/24h pertube l’organisation du service de garde des autres pharmacies de la même zone. Ces pharmacies faisant 24h/24 créent un déséquilibre évident dans l’accès équitable aux médicaments par la réputation qu’elles propagent d’être toujours ouvertes et attirant à elles mécaniquement tous les patients. Ceci au détriment des autres pharmacies de proximité, respectant les tours de garde.
Ces dernières de moins en moins fréquentées connaissent des difficultés qui peuvent affecter la qualité des services qu’elles offrent (disponibilité en médicament, participation aux tours de garde), où même leur viabilité. De ce point de vue, le non encadrement des horaires d’ouverture peut menacer la stratégie de rapprochement des médicaments de la population, que met en œuvre le Gouvernement à travers la carte pharmaceutique. Cette carte pharmaceutique fixe les zones d’implantations des pharmacies et l’intérêt pour la santé publique est qu’elles y subsistent.
Il existe cependant des situations d’exception pour l’ouverture 24h/24, c’est le cas d’une pharmacie située en zone reculée qui peut ouvrir 24h/24h ou instaurer un système d’astreinte durant lequel, le pharmacien reste joignable à travers un numéro de téléphone qu’il communique au public.
Enfin il est important de rappeler que la décision de réorganisation des tours de garde, fait suite à des réunions de concertations entre toutes les pharmacies (grandes, moyennes et petites) qui ont unanimement décidé de respecter les nouveaux horaires de service et de participer aux tours de garde sans aucune dérogation. Aucune de ces grandes pharmacies à notre connaissance, n’est demandeuse de réouvrir 24h/24.
Il n’y a même pas de médicaments dans ces pharmacies de proximité qui assurent la garde. Il fallait réfléchir à approvisionner ces pharmacies avant de prendre cette décision.
– L’entrée dans un tour de garde pour une pharmacie lui impose de renforcer son stock en médicaments pour faire face à l’affluence qu’elle va connaître du fait de la continuité du service de garde.
Il faut reconnaître que certaines pharmacies du fait de leurs difficultés antérieures, n’étaient pas prêtes sur ce point et sont en partie à l’origine de la plupart des plaintes observées. Sur la base des orientations du Gouvernement, des discussions doivent être entreprises entre l’Ordre des pharmaciens, les Grossistes répartiteurs et ces pharmacies en difficultés, aux fins de la mise en place d’un mécanisme de renforcement des approvisionnements pour leurs pharmacies. Après une période d’évaluation, si ces pharmacies n’ont toujours pas amélioré la disponibilité en médicaments, elles devront être retirées du planning de garde.
L’Agence béninoise de réglementation pharmaceutique en assure le suivi.
Il y a un réel problème. Celui de la disponibilité en pharmacie. Surtout dans les zones reculées. Que fait réellement l’Etat dans ce sens ?
– Vous abordez un important problème mais qui est déjà en train d’être réglé. Il s’agit de la carte pharmaceutique. Il y a au total 102 officines de pharmacie qui seront créés sur l’étendue du territoire durant la période 2021 à 2023. Tout est fin prêt et d’ici-là, l’opinion sera informée. Cette carte pharmaceutique sera suivie d’une carte des dépôts pharmaceutiques qui vient la compléter et permettre de prolonger la disponibilité du médicament de qualité dans les zones les plus reculées ou enclavées de notre pays.

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